vendredi 16 décembre 2016

Les Dioxines et leurs Effets sur la Santé





Les dioxines sont des polluants de l'environnement. Elles ont la caractéristique douteuse d'appartenir au groupe appelé «dirty dozen», une douzaine de produits chimiques dangereux qui sont des polluants organiques persistants.

Elles posent problème à cause de leur toxicité potentielle élevée. L'expérimentation a montré qu'elles affectaient un certain nombre d'organes et de systèmes. Une fois que les dioxines ont pénétré dans l'organisme, elles s'y maintiennent longtemps à cause de leur stabilité chimique et de leur capacité à être absorbée par les tissus adipeux, dans lesquels elles sont stockées. On estime que leur demi-vie, le temps nécessaire pour perdre la moitié de son activité dans l'organisme, va de 7 à 11 ans.

Dans le monde entier, les dioxines sont présentes dans l’environnement et elles s’accumulent dans la chaîne alimentaire, principalement dans les graisses animales. Plus on monte dans cette chaîne, plus les concentrations en dioxines augmentent.

La dioxine a pour appellation chimique tétrachloro-2, 3, 7, 8 dibenzo-para-dioxine (TCDD). On emploie souvent le terme de «dioxines» pour une famille de composés apparentés sur le plan structurel et chimique. On a identifié quelque 419 apparentés à la dioxine mais on considère que seulement trente d'entre eux ont une toxicité marquée, la TCDD étant la plus toxique.

Dans l'environnement et les aliments, les dioxines se présentent sous la forme d'un mélange complexe. Pour évaluer le risque potentiel de l'ensemble du mélange, on applique la notion d'équivalence toxique à ce groupe de polluants. La TCDD, le produit le plus toxique de cette famille, est utilisée comme référence et, sur la base d'études expérimentales, on détermine l'activité toxique de toutes les autres dioxines par rapport à la TCDD.


Sources de contamination par les dioxines


Les dioxines sont avant tout des sous-produits des processus industriels, mais elles peuvent aussi apparaître lors de phénomènes naturels, comme les éruptions volcaniques ou les feux de forêtsUn incendie peut provoquer une combustion incomplète et la production de dioxines pouvant contaminer les animaux des environs.

Les dioxines sont des sous-produits indésirables dans un grand nombre de procédés de fabrication, comme la fusion, le blanchiment au chlore des pâtes à papier ou la production de certains herbicides et pesticides.

En termes d’émissions de dioxines dans l’environnement, les pires fauteurs de pollution sont les incinérateurs non contrôlés de déchets (déchets solides et déchets des hôpitaux), en raison des combustions incomplètes. On dispose pourtant de la technologie nécessaire pour contrôler l’incinération des déchets et avoir de faibles émissions.

Bien que les dioxines soient produites au niveau local, elles se répandent sur toute la planète. On en a retrouvé dans le monde entier et dans pratiquement tous les milieux. On observe les concentrations les plus élevées dans certains sols, sédiments et aliments, notamment les produits laitiers, la viande, le poisson et les crustacés. En revanche, les concentrations sont très faibles dans les plantes, dans l'eau et dans l'air.

Il y a dans le monde entier des stocks importants d'huiles industrielles usagées contenant des PCB, très souvent avec de fortes teneurs en PCDF. La conservation à long terme et la mauvaise élimination de ces matières peuvent entraîner une libération de dioxines dans l'environnement et la contamination de l'approvisionnement alimentaire de l'homme et de l'animal. Il n'est pas facile d'éliminer les déchets contenant des PCB sans contaminer l'environnement et les populations humaines. Il faut traiter ces matières comme des déchets dangereux et l'incinération à haute température est le meilleur moyen pour les détruire.


Cas de contamination à la dioxine


De nombreux pays surveillent la présence des dioxines dans les denrées alimentaires. C'est ainsi qu'on a détecté rapidement des contaminations et pu souvent éviter des conséquences à grande échelle.

Certains cas ont été plus graves et ont eu des conséquences plus importantes dans de nombreux pays.

Dans de nombreux cas, la contamination à la dioxine passe par l’alimentation des animaux: il y a eu par exemple des cas d’augmentation des teneurs en dioxine dans le lait ou la nourriture de l’animal dont on a trouvé l’origine dans l’argile, la graisse ou des pellets de pulpes d’agrumes utilisés dans la production d’aliments pour animaux.

De grandes quantités de dioxines ont été libérées lors d'un grave accident dans une usine chimique à Seveso (Italie), en 1976. Un nuage toxique, comportant de la tétrachlorodibenzo-2, 3, 7, 8 p-dioxine, ou TCDD, a été libéré dans l'atmosphère et a fini par contaminer une zone de quinze kilomètres carrés avec une population de 37.000 habitants. Des études approfondies sur la population touchée se poursuivent pour déterminer les effets à long terme de cet accident sur la santé de l'homme.

Fin 2008, l’Irlande a rappelé des tonnes et des tonnes de viande de porc et de produits dérivés, lorsqu’on a détecté des quantités de dioxines jusqu’à 200 fois plus élevées que la limite de sécurité dans des échantillons de porc. Cette découverte a entraîné l’un des plus gros rappel d’aliments en relation avec une contamination chimique. Les évaluations du risque faites en Irlande n’ont pas mis en évidence de problème pour la santé publique. L’origine de cette contamination a été retrouvée dans l’alimentation contaminée des animaux.



En 1999, on a trouvé des concentrations élevées en dioxines dans des volailles et des œufs en Belgique. Par la suite, des produits alimentaires à base d'animaux et contaminés par des dioxines (volailles, œufs, porcs) ont été détectés dans plusieurs pays. L'origine en était des aliments pour animaux contaminés par de l'huile industrielle usagée contenant des PCB et éliminée illégalement.

On a également étudié de manière approfondie les effets sanitaires de la TCDD liés à sa présence en tant que contaminant de certains lots «d'agent orange», herbicide utilisé comme défoliant au cours de la guerre du Viet Nam. Les investigations se poursuivent sur le lien avec certains types de cancers et le diabète.

Bien que tous les pays puissent être touchés, la plupart des cas ont été notifiés dans des pays industrialisés qui ont un meilleur contrôle des contaminations alimentaires, une plus grande connaissance des dangers et de meilleurs dispositifs réglementaires pour détecter les problèmes de dioxines.



Quelques cas d'intoxication humaine délibérée ont également été signalés. Le plus notable est, en 2004, celui de Viktor Louchtchenko, président de l'Ukraine défiguré par une chloracné ou acné chlorique), la formation de taches sombres sur la peau et une altération de la fonction hépatique.



Effets des dioxines sur la santé de l'homme


Compte tenu de l'omniprésence des dioxines, tous les êtres humains ont des antécédents d'exposition et une certaine concentration de ces produits dans l'organisme, entraînant ce que l'on appelle une charge corporelle. Actuellement, l'exposition de fond normale ne devrait pas, en moyenne, avoir d'influence sur la santé. Toutefois, en raison de la toxicité potentiellement élevée de cette classe de produits, il faut faire s'efforcer d'abaisser le niveau actuel de l'exposition de fond.

* Les dioxines sont très toxiques et peuvent provoquer des problèmes au niveau de la procréation, du développement, léser le système immunitaire, interférer avec le système hormonal et causer des cancers.

* L’exposition brève de l'homme à de fortes concentrations en dioxines peut entraîner des lésions dermiques, comme la chloracné.

* L'exposition de longue durée s'associe à une dégradation du système immunitaire, du développement du système nerveux, du système endocrinien et des fonctions génésiques.

* L'exposition chronique aux dioxines chez l'animal, a entraîné plusieurs types de cancers. Le Centre international de Recherche sur le Cancer (CIRC), agence de l'OMS, a évalué la TCDD en 1997 et 2012. Sur la base des données épidémiologiques chez l'homme et des informations sur l'animal, le CIRC l'a classée dans les «cancérogènes pour l'homme». En revanche, elle n'altère pas le patrimoine génétique et, en deçà d'un certain niveau d'exposition, le risque cancérogène serait négligeable.


Le fœtus en développement est le plus sensible à l'exposition à la dioxine. Le nouveau-né, dont les systèmes organiques se développent rapidement, pourrait également être plus vulnérable à certains effets.

Certaines personnes ou groupes de personnes peuvent être exposés à de plus fortes concentrations en dioxines à cause de leur régime alimentaire (par exemple, ceux qui consomment beaucoup de poisson dans certaines régions du monde) ou de leur profession (les personnes travaillant dans le papier et la pâte à papier, dans les sites d'incinération ou de traitement des déchets dangereux).


Prévention et lutte contre l'exposition à la dioxine


La meilleure méthode de prévention et de lutte consiste à incinérer correctement les matières contaminées, ce qui peut aussi détruire les huiles usagées contenant de PCB. L'incinération doit se faire à haute température, plus de 850°C. Pour détruire de grandes quantités de matières contaminées, il faut même atteindre des températures plus élevées, au moins 1000°C.

C'est en prenant des mesures à la source que l'on réussit le mieux à éviter ou à diminuer les expositions, c'est-à-dire en contrôlant rigoureusement les processus industriels pour réduire autant que possible la formation de dioxines.

Cela est du ressort des autorités nationales mais, reconnaissant l'importance de cette approche, la Commission du Codex Alimentarius a adopté en 2001 un code d'usages en matière de mesures prises à la source pour réduire la contamination des denrées alimentaires par les substances chimiques et, en 2006, un code d'usages pour la prévention et la réduction de la contamination des aliments par les dioxines et les PCB de type dioxine.

Plus de 90% de l'exposition de l'homme aux dioxines provient de l'alimentation, principalement de la viande, des produits laitiers, des poissons et des crustacés. Il revient aux gouvernements nationaux de surveiller la sécurité sanitaire de l’approvisionnement alimentaire et de prendre des mesures pour protéger la santé publique.

Il est par conséquent essentiel de protéger l'approvisionnement en denrées alimentaires. L'une des méthodes consiste à prendre des mesures à la source pour réduire les émissions de dioxine. Il faut aussi éviter les contaminations secondaires des denrées dans toute la chaîne alimentaire. Les contrôles et les pratiques de qualité pendant la production, la transformation et la distribution sont essentiels pour produire des denrées sûres.

Des systèmes de surveillance des contaminations des aliments doivent être mis en place pour veiller au respect des niveaux tolérés. Il revient aux producteurs d’aliments pour animaux et à usage humain de s’assurer de la qualité des matières premières et de la sécurité des processus de production.


Que doit faire le consommateur pour réduire son risque d'exposition ?


Il pourrait réduire l'exposition aux dioxines en dégraissant la viande et en consommant des produits laitiers allégés en matières grasses. Un régime équilibré  comprenant des quantités suffisantes de fruits, de légumes et de céréales  permettra aussi d'éviter une exposition excessive à une source en particulier.

Il s'agit d'une stratégie sur le long terme pour réduire la charge corporelle et elle est probablement plus intéressante pour les jeunes filles et les jeunes femmes afin de diminuer, à un stade ultérieur, l'exposition des enfants pendant la grossesse et l'allaitement.

La possibilité qu'ont les consommateurs de réduire leur exposition reste cependant assez limitée.


Que faut-il faire pour détecter et doser les dioxines dans l'environnement et les aliments ?



L'analyse chimique quantitative des dioxines fait appel à des techniques complexes que seul un nombre limité de laboratoires dans le monde, pour la plupart dans les pays industrialisés, peuvent mettre en œuvre. Les coûts sont très élevés et varient selon les échantillons. Ils vont de 1700 dollars pour l'analyse d'un échantillon biologique unique à plusieurs milliers de dollars américains pour l'évaluation complète des émissions d'un incinérateur à déchets.

On met de plus en plus au point des techniques de dépistage biologique (reposant sur des cellules ou des anticorps). Leur utilisation pour les denrées alimentaires n'a pas encore été suffisamment validée. Elles permettront néanmoins de faire davantage d'analyses à moindre coût. Les résultats positifs devront être confirmés par des analyses chimiques plus complexes.


Action de l'OMS en matière de dioxines


La réduction de l'exposition aux dioxines est un objectif important pour la santé publique (baisse de la charge de morbidité) et pour le développement durable. Afin de donner des orientations sur les niveaux d'exposition acceptables, l'OMS a organisé une série de réunions d'experts pour déterminer les doses tolérables de dioxines auxquelles les êtres humains peuvent être exposés tout au long de leur vie sans effet nocif.

Pour la première fois en 2015, l’OMS a publié des estimations sur la charge mondiale de morbidité imputable aux maladies d’origine alimentaire. Les effets des dioxines sur la fertilité et la fonction thyroïdienne ont été considérés dans ce contexte et la prise en compte de ces deux critères de jugement seulement montre que ce type d’exposition peut contribuer à une part significative de la charge de ces maladies dans certaines régions du monde.

L'OMS a aussi fait depuis 1987 des études régulières sur les concentrations en dioxine dans le lait maternel. Celles-ci permettent d'évaluer l'exposition de l'homme aux dioxines de toutes origines. Les données récentes indiquent que les mesures prises pour réduire les émissions de dioxines dans un certain nombre de pays ont abouti à une baisse sensible de l'exposition à ces composés au cours des 20 dernières années. Les données en provenance des pays en développement sont incomplètes et ne permettent pas encore de procéder à une analyse des tendances dans le temps.

Au cours des 15 dernières années, l'OMS a établi et régulièrement réévalué, par l'intermédiaire de son Programme international sur la sécurité chimique (IPCS) et par le biais de consultations d'experts, les facteurs d'équivalence toxique (FET) pour les dioxines et les produits apparentés. Les valeurs des FET ainsi établies s'appliquent à l'être humain, aux mammifères, aux oiseaux et aux poissons.

En 2001, le Comité mixte FAO/OMS d'experts des additifs alimentaires a procédé à une évaluation actualisée complète du risque pour les PCDD, les PCDF et les PCB «de type dioxine». Afin d'évaluer les risques sur le long terme et le court terme, il faut évaluer pendant plusieurs mois l'absorption totale ou moyenne et la dose tolérable sera évaluée sur une période d'au moins un mois. Les experts ont établi une dose mensuelle tolérable provisoire de 70 picogrammes/kg par mois. C'est la quantité de dioxines qui peut être ingérée pendant toute une vie sans avoir d'effets détectables sur la santé.

En collaboration avec l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO), par le biais de la Commission du Codex Alimentarius, l'OMS a établi un «Code d'usages pour la prévention et la réduction de la contamination des aliments par les dioxines et les PCB de type dioxine». Les autorités nationales et régionales trouvent dans ce document des orientations sur les mesures préventives.

L'OMS a également depuis 1976 la responsabilité du programme conjoint de surveillance et d'évaluation de la contamination alimentaire dans le cadre du système mondial de surveillance continue de l'environnement (communément appelé GEMS/Food). Ce programme informe sur les teneurs et les tendances des polluants dans l'alimentation grâce à son réseau de laboratoires répartis dans 50 pays. Les dioxines font partie du programme de surveillance.

L'OMS poursuit maintenant ces études en collaboration avec le Programme des Nations Unies pour l'environnement (PNUE) dans le cadre de la mise en œuvre de la «Convention de Stockholm», un accord international pour réduire les émissions de certains polluants organiques persistants (POP), dont les dioxines. On envisage un certain nombre d'actions pour diminuer la production des dioxines au cours de l'incinération et des processus de fabrication.

Un certain nombre d’actions sont envisagées pour réduire la production de dioxines au cours des processus d’incinération et de fabrication. L’OMS et le PNUE entreprennent désormais des études mondiales du lait maternel, y compris dans de nombreux pays en développement, pour surveiller l’évolution de la contamination à la dioxine dans le monde et l’efficacité des mesures prises au titre de la Convention de Stockholm.

La prévention ou la diminution de l’exposition de l’être humain marchent le mieux en prenant des mesures à la source, c’est-à-dire en instaurant un contrôle rigoureux des processus industriels pour réduire la formation de dioxines.


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